Albanie XXI : à la recherche de « l’homme nouveau »
L’histoire de l’Albanie me tient à cœur car “Le pays des aigles” est un concentré de l’histoire du monde. C’est l’histoire de l’Europe, de la guerre, du nazisme, de la guerre froide, de la libération, des idéaux qui ont agité le monde au vingtième siècle, de « l’homme nouveau », de la liberté, de l’indépendance, mais c’est aussi l’histoire du communisme, du maoïsme, du stalinisme, de la dictature, de l’athéisme, du goulag, de l’asservissement, de la paranoïa … puis de la renaissance, du combat jamais gagné pour la démocratie, du retour difficile à la liberté. L’histoire du monde condensée sur un tout petit territoire.
Une histoire toujours en marche : le nouvel empire Ottoman d’Erdogan est de retour dans les Balkans.
En 1981, la seule manière de voyager en Albanie était de se joindre à un groupe d’amitiés marxistes-léninistes. Dans mon groupe de “sympathisants”, nous étions deux journalistes incognito. Il n’y avait aucun vol régulier pour Tirana. Le pays était coupé du monde. L’été, une fois par semaine, les associations d’amitiés marxistes-léninistes européennes s’associaient pour affréter un charter qui décollait de Cologne à destination de Tirana, remplis de « touristes amis». A l’aéroport, un comité d’accueil, des guides et un coiffeur, nous attendaient : les cheveux longs, la barbe et les mini-jupes étaient interdits !
L’Albanie était, pour moi, d’abord un pays épique et romanesque. J’étais imprégné des romans d’Ismaïl Kadaré. En particulier « Le Général de l’armée morte ». J’étais aussi imprégné de la Syldavie du «Sceptre d’Ottokar », de la Shqipëria de mes timbres postes, et du royaume de “Goto île d’amour”, le superbe film méconnu de Walerian Borowczyk dans lequel Claude Brasseur joue le rôle d’un dictateur iconoclaste.
J’étais aussi curieux de voir ce socialisme en marche, même si je ne me faisais aucune illusion. J’étais plutôt de gauche, sensible aux idées socialistes ; bref ce petit pays, grand comme deux départements français, était un tissu de contradictions et son étrangeté, son isolationnisme m’intriguaient.
Il faut aussi se rappeler du contexte international. Quelque mois avant, j’étais en Afghanistan pendant l’invasion russe, et j’avais couvert la révolution islamique en Iran. Pour moi, le temps des révolutions ne faisait que commencer. Le soir, à la veillée, dans notre hôtel de Durrës, loin de la ville et à l’écart de la population, on nous projetait des films sur la lutte anti nazi et c’était l’occasion d’un débat avec des sujets comme : « Peut-on construire le communisme sans changer l’Homme? »
« Non, répondaient nos amis Albanais, Il faut tout revoir. »
Et ils s’y employaient. Sous Enver Hoxja, dès le plus jeune âge, on s’applique à extirper les bases de « l’individualisme, de la superstition. ». L’encadrement des enfants est organisé dès la crèche. On a remplacé la religion par des leçons de morale socialiste. C’est le groupe social qui inflige punition et récompense. Critique collective, autocritique, critique de masse, cela rappelait un peu la révolution culturelle, appliquée à des jeunes enfants.
L’homme nouveau c’est d’abord le soldat.
Enfants, les petits Albanais se voient offrir des fusils en bois. Ils ne se contentent pas de jouer, mais montent vraiment la garde, aux portes des camps de pionniers. En occident, les gens généralement s’élèvent contre ces jeux guerriers, là-bas, c’est le contraire.
Il faut habituer les enfants à la guerre. Les moniteurs d’un camp de vacances, m’ont raconté qu’ils ont eu beaucoup de mal à organiser un combat, devenu classique, entre Allemands et partisans Albanais.
Les enfants pleuraient : ils ne voulaient pas jouer le rôle des Allemands : « je ne veux pas être Allemand, mon papa est un partisan ! » Pour ces enfants-là, ce n’est pas un jeu.
Cet enseignement militaire se poursuit, tout au long de leur existence. Les femmes, “aujourd’hui égales de l’homme”, n’en sont pas exemptées.
L’étude constitue le deuxième volet de cette éducation socialiste et le travail productif, le troisième. Les jeunes travaillent gratuitement, au moins un mois par an, pour la collectivité. Les adolescents « les actionnistes » ont construit la quasi-totalité des voies ferrées albanaises (aujourd’hui à l’abandon).
On les envoie également dans les champs, pour les grands projets : irrigation, défrichage etc. Avant d’entamer leurs études supérieures, ils doivent retourner à la production. L’adolescent doit non seulement montrer ses aptitudes scolaires, mais surtout ses possibilités politiques, son abnégation, son désir de servir la société, C’est le groupe de travailleurs qui décide finalement si l’étudiant est apte à poursuivre des études. Les études terminées, il est envoyé soit dans l’usine ou à la coopérative d’où il vient, soit dans un autre district où on aura besoin de lui. Tout au long de sa vie, le travailleur est censé servir la société. Les jeunes gens, quand ils se marient, peuvent être ainsi envoyés loin de leur famille, là où leur devoir les appelle.
Pendant les débats avec nos amis albanais, on devait « se taper » cette propagande. Évidemment on ne parlait pas de goulag, de prison, et les questions sur la religion étaient mal venues. Les Albanais s’étaient simplement débarrassés de « l’opium du peuple »…
L’Albanie somnolente vivait “hors du temps”. On ne pouvait circuler qu’en groupe et photographier était toujours un peu suspect. On ne visitait que les sites touristiques et quelques usines modèles, le musée des réalisations socialistes où étaient exposés quelques tracteurs chinois, la galerie d’art réaliste et nous retournions dans notre hôtel loin de tout et surtout de la population. Pas question de se mélanger !
Des affiches de propagande un peu défraîchies occupaient les murs, et les rues étaient vides de voitures mais encombrées de carrioles à cheval. “La bande des cinq ”, Marx, Engels, Lénine, Staline, Mao, était réduite à quatre. Mao avait disparu des affiches en 1968 suite à une brouille avec le grand frère chinois au moment même où les maoïstes français et européens défilaient avec le petit livre rouge en scandant “ Marx, Engels, Lénine, Staline, Mao.
En 1968, l’Albanie était totalement coupée du monde. Les échanges commerciaux se faisaient sur la base du troc. L’homme d’affaires français, Julien Roche, échangeait des équipements de télécommunication français contre des épices ou des moutons. A la fin de la dictature, il créa la première compagnie aérienne albanaise.
Je reviendrai dans un prochain chapitre plus longuement sur l’histoire de l’Albanie.
ALBANIA. Ismail Kadaré . Hommage
Michel SetbounALBANIA 1981 August. Durres. Ismail Kadare portrait of the novelist. ALBANIA 1986 Tirana under the…
Albania. The new country for migrants
Michel SetbounQuand les Taliban prennent le pouvoir à Kaboul, les Afghans exfiltrés par la CIA trouvent refuge…
Albania Exhibition
Michel SetbounSamedi 18 mars , Maison de l’Albanie à Paris 26 Place Denfert Rochereau . Apres…
ALBANIA, The Rufais
Michel SetbounTHE RETURN OF RELIGIOUS SECTS Allah, Allah, Allah…” Two dozen~worshippers chant the name of their…
Albania : 40 vjet histori ne vendin e Shqiponjave
Michel SetbounAlbanian traduction on the way by Indrit Topi , “under construction” Shqipëria I : introduction…
Solo Exhibition in Marubi Museum.
Michel Setbounin Albanian MICHEL SETBOUNfotoreporteri në kohën e duhur, në vendin e duhur25.11.2022 – 19.02.2023 📍Hapja…
ALBANIA page
Michel SetbounHere you will find the links for everything Albania. it will take me some time…
Albania, “40 years of history” The book
Michel SetbounIn the country of eagles. The book in Albanian and English https://youtu.be/QQ6XY0X-l_4 some pages of…
Exhibition Albania 40 years at the C.O.D.
Michel SetbounSecond exhibit in Tirana at Center of Openness and Dialogue under construction, more coming soon…
Solo Exhibition in Marubi Museum
Michel SetbounMarubi Museum is glad to present Michel Setboun’s solo show curated by Luçjan Bedeni. Michel…
Exhibition: “Albania history” at the C.O.D.
Michel SetbounFirst exhibit in Tirana at Center of Openness and Dialogue under construction, more coming soon…
Albanie I : 40 ans d’Histoire(s).
Michel SetbounProjet en Cours Depuis des décennies, j’ai voyagé dans le monde entier, couvert de nombreuses…
Albanie II : l’homme qui ne pouvait pas se reconnaître
Michel SetbounAlbania. Plug was a deportation village under the communist regime; the former relegates don’t know…
Albanie III : “le général de l’armée morte”
Michel SetbounAlbania. Shkoder. father Vicenzo show an image of the cathedral as a sport palace inside…
Albanie IV : “la mort de Dieu
Michel SetbounEn 1967 le dictateur communiste Enver Hoxha, dandy et prof de francais formé a Montpelier,…
Albanie V : “Quand Un plancher se transforme en iconostase “
Michel SetbounAlbanie V: Quand Un plancher se transforme en iconostase En 1967, le dictateur communiste Enver…
Albanie VI : ” La mariée était en pleurs… “
Michel SetbounJ’ai rencontré Ana et Frederick son frère en 1990, à Jubani, dans un petit village…
Albanie VII : “L’église était en ruines”
Michel SetbounCe matin de 1991, nous sommes partis en procession vers l’ église du village, la…
Albanie VIII : il y a 29 ans, “Dieu” était de retour en Albanie
Michel SetbounJ’ai retrouvé Imeri Nga à Shkodra, là où je l’avais quitté il y a vingt-neuf…
Albanie IX : Arjana Ceka, une douleur intacte
Michel SetbounLe 3 avril 1991, les résultats des premières élections libres, depuis la fin de la…
Albanie X : L’art au service du dictateur
Michel SetbounAlbanie Tirana .Leka Rrhuda et Pire Tsekos dans l’atelier d’art, l’ancienne mosquee Dhine Hoxha en…
Albanie XI : Artan Broci, une douleur intacte.
Michel SetbounAlbania Shkoder 1990 during. Riots in Skodra, sit up with Arben BROXI (Broci) in the…
Albanie XII : Le baptême et la bouteille de Soda..
Michel SetbounUn conte de Noël, un vrai…, Albania. Rebirth of Christianism after the collapse of the…
Albanie XIII : Tasha Sejko, la mariée de Saranda
Michel SetbounAlbania under the communist regime. Tasha Sejko 30 years after her wedding in SARANDA: on…
Albanie XIV : Avril 1991, ouverture des “goulags” albanais
Michel SetbounOn découvre enfin ce que les albanais ont vécu après quarante ans de dictature :…
Albanie XV : Taçi Pano, le poète, a passé 21 ans en prison
Michel SetbounSuite du chapitre XIV texte d’Edith Canestrier publié dans Marie Claire en décembre 1991 Et…
Albanie XVI : « Marie-Claire » au pays des aigles
Michel SetbounNous avons travaillé avec Edith Canestrier pour le journal “Marie Claire” sur le goulag albanais…
Albanie XVII : Edi Luarasi, l’actrice “déchue”
Michel SetbounAlbania Tirana may 1991 Edi Luarasi , the actress after 20 years of relegation under…
Albanie XVIII : « les quatre cents coups »
Michel SetbounAlbania Tirana . Four former school children in front of their former school Shkoza Primary…
Albanie XIX: Le monde d’Orwell devient réalité
Michel SetbounA la fin de la dictature, pour relâcher la pression sur le peuple en colère,…
Albanie XX : Tirana, La salle de torture
Michel SetbounAlbania. Tirana maternity 1991 Salle d’accouchement: Maternité de Tirana: Le dénuement est total: pas de…
Albanie XXI : à la recherche de « l’homme nouveau »
Michel SetbounL’histoire de l’Albanie me tient à cœur car “Le pays des aigles” est un concentré…
Albanie XXII : inch’Allah
Michel SetbounBerati circumcision little guy: Enis Axhia. His father: Luke. he was the first boy circumcised…
Albanie XXIII : « ITALIA, ITALIA, ITALIA ! » 26 février 1990
Michel SetbounDans le port de Durrës, des milliers de gens poussent un cri d’espoir, le nom…
Albanie XXIV : Shengjin, 26 février 1991
Michel SetbounVlora et Shengjin, les deux autres ports du pays sont aussi bloqués par les candidats…
Albanie XXV : le mystère de la grande pyramide
Michel SetbounJe n’ai jamais rencontré Enver Hoxha qui est mort en 1985, soit juste un an…
Albanie XXVI : Gjirokastra, la ville de pierre.
Michel SetbounL’église de la résurrection Albanie Gyrokastra. Église orthodoxe Michael et Graville (1737) transformée en entrepôt…
Albanie XXVII : Des petits vélos qui tournent dans ma tête…
Michel Setboun« L’homme qui ne voulait pas se souvenir » Tirana 1087 : Le vélo est…
Albanie XXVIII : Les cathédrales du communisme
Michel SetbounPour raconter l’Albanie au présent je suis parti à la recherche des témoins du passé…
Albanie XXIX : l’usine sidérurgique d’Elbassan
Michel SetbounUrbex 1 : les cathedrale du communisme Pendant la période communiste, le combinat sidérurgique d’Elbasan…
Albanie XXX : la mine de bauxite de Kukës
Michel SetbounJe n’ai pas pu visiter la mine de Kukës pendant la période communiste. Les sites…
Albanie XXXI : Korçë
Michel SetbounUrbex 3; la centrale electrice de Korca Personne en France ne connaît la ville de…
Albanie XXXII : Valias fait grise mine
Michel SetbounUrbex 4 Albanie mai 1990 Mine de charbon de Valias, le pays est encore parsemé…
Albanie. XXXIII
Michel SetbounAlbanie. Skodra 1991 Hôpital des enfants handicapés mentaux à Skodra. Il n’y a plus un…
Albanie XXXIV : “retour au pays du « Seigneur des anneaux “
Michel Setboun“Return to the Land of the “Lord of the Rings” Albania . Lac, chemical factory…
Albanie XXXV : les mariés de Derviçan
Michel SetbounAlbanie august 08 1987 . Dervician mariage traditionnel sous le régime communiste qui a aboli…
Albanie XXXVI : Monsieur Cinéma
Michel SetbounAlbania under the communist regime. A movie-truck crosses the country and travels among the distant…
Albanie XXXVII : « La vieille dame très digne ».
Michel SetbounUne photo pour l’au-delà. Albania under the communist regime. wedding in the village of Dervican…
Exhibition: “return to Dervican”
Michel SetbounFirst exhibition in Albania under construction, more coming soon Albania. Dropull area, greek minority, with…