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AFGHANISTAN 50 years of History

Afghanistan 02/A

les talibans et l’Hindou Kush….

Je me rends bien compte de la difficulté à expliquer l’histoire complexe de l’Afghanistan. Il me faudrait bien sûr plus de temps pour travailler ces textes mais, au-delà de l’émotion et de l’hystérie ambiante, il me semble urgent de donner quelques précisions pour comprendre ce qui est en jeu en ce moment . L’intérêt actuel pour l’Afghanistan n’est pas un hasard, depuis Ben Laden le monde s’est rétréci, ces guerres qui nous semblaient éloignées sont à nos portes. La suite dans mon prochain article

1 l’indoukoush

revenons aux racines de cette histoire. Voici une analyse geographique et ethnique un peu schématique car la réalité est, bien sûr, toujours plus compliquée. L’Afghanistan est constitué d’une mosaïque de peuples aux langues différentes. L’indu-kush , une chaîne de montagne himalayenne, coupe le pays en deux. C’est une vraie barrière géographique avec des pics à plus de 5000m. Mais l’hindu kush est aussi une barrière linguistique et ethnique. Au nord, la population parle Dari (persan), au sud elle parle le Pashto.

Au sud de L’Hindou kush vivent donc les Pachtounes ( 40% de la population). Leur territoire, coupé en son milieu par l’empire colonial britannique s’étend en fait jusqu’à la vallée de l’indus, au Pakistan, ce territoire pashtoun est appelé “la frontière du Nord Ouest, ou “zones tribales” car peuplé par des tribus afghanes , ces provinces sont toujours revendiqué par les afghans. 

En dehors des routes nationales ce ne sont pas les lois pakistanaises qui s’applique, mais le droit pashto le “pashtunwali”; avec ses juges specifiques, les armes y sont en vente libre. Ces pashtounes ne forment pas une nation cohérente, Au contraire, ce sont des dizaines de tribus souvent en conflit qui occupent chacune, une vallée, un village, une montagne etc. Au nord de l’Hindou kush vivent des peuples d’Asie centrale, principalement sunnites, Tadjiks, Ouzbeks, kirgizes, Turkmènes etc .  Leur langue est le Dari ( en gros du persan).  Mais aussi des Hazaras (20% de la population) qui vivent au centre du pays , détestés et humiliés par les Pashtounes car ils sont chiites.. Cette division entre le nord et le sud , entre pachtounes et tribus du nord de langue persane est essentielle pour comprendre l’histoire de l’Afghanistan. Le mot Afghanistan signifie d’ailleurs “pays des Pachtounes” .

Les Pashtounes ont donc depuis toujours eu pour ambition de diriger le pays. Ils ont toujours revendiqué le pouvoir. 

Meme au sein du parti communiste, à l’époque de Taraki, il y avait deux factions: le “ Khallq” plutôt pashtoune et campagnard et le “Parcham” plutôt Dari et citadin. D’ailleurs des les premiers mois du communisme en 1979 Afizulah Amin Premier ministre du Parcham , fera assassiné le president Taraki du Khalq.

2 Des moudjahidines aux talibans

Les talibans que l’on retrouve des deux côtés de la frontière pakistanaise sont simplement ces moudjahidines / Pashtounes radicalisés au contact des combattants d’Arabie saoudite et des services secrets pakistanais ( je fais très court car là aussi il y aurait beaucoup à dire).Le Pakistan qui possède l’arme atomique est aussi un allié des USA qui lui fournit son matériel militaire. Avant l’arrivée des combattants étrangers, soutenus par la CIA, les afghans étaient musulmans en grande majorité Hanafistes, une école de l’islam traditionnel sans ambition expansionniste spécifique, c’est l’islam de l’empire ottoman. Ce sont bien nos amis moudjahidines que j’ai bien connus, qui étaient nos alliés, qui sont devenus ces talibans que nous craignons aujourd’hui. C’est bien les services secrets pakistanais, alliés des USA, qui ont créé ce mouvement radical. 

Ci-dessous des images des campagnes électorales du parti taliban au Pakistan, un parti tout à fait légal , dans un pays ou 0,5% des dépôts bancaires servent à financer l’islam. Au Pakistan et en particulier dans les zones frontalières peuplés de pashtounes, Il y a donc des milliers d’écoles où l’on enseigne exclusivement le coran en particulier dans les zones tribales.Quand les talibans ont pris le pouvoir en 1996 en renversant le gouvernement communiste de Najibullah, ce sont donc bien les moudjahidines/ Pachtounes qui reprennent le pouvoir. Ils interdisent d’ailleurs d’utiliser le Dari ( persan) comme langue officielle et imposent le Pashto.Vous me suivez toujours, je reviendrai longuement sur l’histoire de Najibullah avec lequel j’ai échangé quelques balles … de tennis, alors que Kaboul était encerclé par les armées de… Massoud 

Les talibans, quoique partis à la conquête du pays pour rétablir l’ordre religieux, avaient un programme implicite qui consistait à réinstaller l’ordre pachtoun. Les Pachtouns estiment avoir une sorte de droit prééminent à exercer le pouvoir en Afghanistan. Cela explique d’ailleurs que certains Afghans en exil, pourtant très éloignés idéologiquement des talibans, se sont sentis un temps une certaine tendresse pour eux. 

En 2001 quand les américains ont envahi l’Afghanistan ils se sont appuyés tout naturellement sur les ennemis des talibans, les ennemis des Pashtounes, c’est à dire les tribus de l’alliance du Nord, majoritairement persanophones, dont Massoud est l’incarnation, en faisant l’erreur funeste de ne pas intégrer les Pachtounes dans le nouveau pouvoir (encore une fois schématique, car karzai est Pashtoune). Donc pendant ces 20 ans d’occupation étrangère, les Pashtounes devenus talibans sont mis à l’écart du pouvoir. Cette division nord sud , Pashto / Dari est toujours au cœur des problèmes passés et à venir du pays. Aujourd’hui avec le retour des talibans, c’est bien la revanche des Pashtounes.

Voici une explication très schématique, mais l’idée est là. 

Les anglais auraient dû déplacer la ligne Durand au milieu de L’Hindou Kush , cette barrière géographique ethnique et linguistique naturelle. Mais leur politique était de “ diviser pour régner”, ce qu’ils ont d’ailleurs fait un peu partout dans le monde. Nous en subissons encore les conséquences aujourd’hui. 

Pour illustrer cette histoire quelques images 

L’INdoukoush une frontière naturelle

Les talibans au pakistan

le stalingrad des Talibans

En 1998, j’ai obtenu un rare visa de journaliste délivré par l’Émirat islamique d’Afghanistan. Bien sûr il était absolument interdit de prendre des photos, (je raconterai l’histoire en détail plus tard)

Alors que nous cherchions un camp d’entraînement de combattants arabes à la sortie de Kandahar, nous sommes tombés par hasard sur un immense champ de tombes au milieu du désert où s’étaient rassemblés des dizaines de talibans. 

Une scène surréaliste, ces talibans déambulaient au milieu de tas de terre en inspectant les objets, vêtements, chaussures, chaussettes , déposés sur des tombes, afin d’identifier les morts : leurs proches, leurs parents, leurs amis.

Ces corps avaient été rapatriés depuis le nord de l’Afghanistan à la suite d’un accord avec le général Dostom, un Ouzbek , seigneur de guerre dans la région de Mazar-I-sharif.

Des milliers de Talibans venus installer leur ordre au nord du pays étaient tombés dans un embuscade organisée par Le célèbre général qui retournera sa veste à plusieurs reprises.

Le “ Stalingrad afghan” a bien sûr nourri l’inconscient collectif des Pashtounes devenus talibans.

L’Hindu kush c’est ça ; une chaîne de montagnes qui dépasse les 5000 mètres. Le col de Salang (3800 m) est le point de passage obligé entre Kaboul et le Nord de l’Afghanistan. 

En 1988, je retournais vers Kaboul dans un convoi militaire car l’aéroport de la capitale était bombardé par les armées de l’alliance du nord. Notre convoi a été coincé pendant plusieurs jours dans une tempête au col de Salang. La vallée du Panshir, fief du commandant Massoud , est à quelques kilomètres , à portée de tirs. Par miracle , cette semaine là, les hommes de Massoud sont restés au chaud dans leur vallée.

Michel Setboun

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